Victoire de Castellane,
passionnée par la couleur

Sillonnez les allées du jardin du grand couturier, Christian Dior, à Milly-la-Forêt où il possède un moulin dans lequel il se met au vert le week-end. Roses à foison, clochettes de muguet et joyeux enchevêtrement de végétaux… Et, le fameux potager coloré, planté de carottes et de choux – ceux-là même qui figurent sur les bagues de cocktail démesurées et extravagantes de la collection « Incroyables et merveilleuses ». On dirait de gros bonbons, évocateurs du monde de l’enfance de Victoire de Castellane.

Grâce à elle, le monde de la joaillerie redécouvre, médusé, la richesse chromatique de la tourmaline, du spinelle, de l’aigue-marine ou de la morganite qu’elle fait cohabiter avec les 4 pierres précieuses – diamant, rubis, saphir et émeraude. Elles contrastent, se répondent, sont complémentaires… La Place Vendôme se laisse alors « bousculer » par cette femme qui révolutionne les codes de la joaillerie en appliquant au bijou précieux les formes, les couleurs et les matières du bijou fantaisie.

Comment Christian Dior a-t-il pu vivre ses amours à son époque ? De manière rebelle : « comme un pirate », imagine Victoire de Castellane. Les colliers de la collection « la Fiancée du vampire » se font presque gothiques. La créatrice iconoclaste est d’ailleurs la première à s’approprier le symbole de la tête de mort typique des memento mori du Moyen-Âge.

Mais avec la joaillière, il suffit d’une paire d’yeux vert éclatant ou d’un corps en opale aux reflets changeants pour que dragons, méduses et autres serpents du bestiaire fantastique semblent dépourvus de pouvoirs maléfiques. Tous mâtinés de cette fameuse dose d’humour qui traverse d’ailleurs son travail de création, au fil des ans.

Des roses, des roses, toujours des roses… Et sur la planète Dior, où la rose est reine, éclosent aussi de nouvelles fleurs : fleurs vitrail, fleurs imaginaires, fleurs en une explosion de couleurs. Fleurs aux tiges délicatement inclinées. Fleurs réelles ou rêvées…

Dans la collection éponyme, la rose est retravaillée avec cette dissonance baroque propre à Victoire de Castellane. Qui dit aimer « figer la nature en pierres ». Associées, tourmalines, rubellites et grenats évoquent le pointillisme. Autant de touches de couleurs qui semblent cristallisées en galaxies.

Une pluie de comètes de rubis, de saphirs, et d’opales de feu s’abat sur l’univers de la joaillerie ! Ces pierres semblent avoir été jetées là, et s’être, toutes seules, agencées. L’éternité a figé la nature et ses variations de couleurs.

Et comme dans la nature, les agrégats de pierres de Gem Dior dessinent des reliefs extraordinaires qui courent le long du doigt … Morganites, rubellites, améthystes, aigues-marines – pierres butes et organiques – s’entrechoquent… Dans cette collection, la première non figurative de Victoire de Castellane, la créatrice non seulement surprend avec une certaine épure, mais aussi avec des montres qui conservent la forme naturelle de la pierre.